Mesurer les écarts qui comptent pour entreprendre sereinement

10.06.2021 - Léna Picard

Capitaliser sur nos apprentissages est une action indispensable en matière d’entrepreneuriat. C’est la raison pour laquelle, je m’efforce de poser par écrit « mes pensées de femme d’action », de tirer les enseignements de mes expériences pour accentuer les réussites et améliorer ce qui doit l’être.

L’une des problématiques récurrentes du dirigeant-entrepreneur, que j’ai moi-même connue, est celle de la tension extrême. Ce “mauvais stress” naît d’une différence trop forte entre les objectifs fixés et les moyens dont nous disposons.

Il se manifeste sous différentes formes :

· L'inhibition : paralysie et procrastination,

· La fuite : 10 autres projets en cours,

· La lutte : colère contre le monde entier.

Ces manifestations peuvent être exclusives ou cumulatives.

En tout état de cause ce stress n’est jamais bon, jamais productif, et ne sert pas un projet entrepreneurial serein.

Afin de le minimiser, il faut poser nos objectifs et définir les moyens qui doivent être mis en face. Cela équivaut à nous poser 3 questions : sens, moteurs et actions.

Ces questions dont nous nous disons qu’elles sont abstraites et pas si importantes, sont en réalité fondamentales. C’est probablement pour cette raison que nous essayons de les éviter.

Clarifier ses objectifs : Sens, moteur, action

Je ne parle pas d’entreprise ou de projet d’entreprise. Je m’intéresse au dirigeant-entrepreneur. Je ne parle pas d’objectifs personnels comme la rémunération, la gestion du temps pro/perso… Je pense aux tripes. A ce que nous avons au fond du ventre et qui, in fine, réagit toujours. Je ne parle pas de présentations aux autres, j’évoque la représentation pour soi. Poser nos sens, moteurs et envies d’action, c’est agir pour soi, pour la sérénité et la réussite de notre projet entrepreneurial.

Le sens du sens

Lorsque j’ai créé ma première entreprise, en 2008, nous ne parlions pas, ou peu, de sens. Au mieux nous évoquions la vision d’entreprise qui est, en fait, un pas juste après. Aujourd’hui le sens est partout. La loi “pacte” instaure la notion d’« entreprise à mission » qui permet de « déclarer une raison d’être à travers plusieurs objectifs sociaux et environnementaux ».

Les collaborateurs des fameuses générations Y et Z exigent du sens à leur travail. Il est impossible de trouver un article sur le management qui n’évoque pas ce sujet.

Comment un dirigeant-entrepreneur peut-il donner un cap, un sens d’action profond, sans s’être d’abord posé ces questions pour lui-même ?

Aujourd’hui cela semble difficile.

Bien plus que pour les autres, c’est indispensable pour soi.

Dans ce métier il est difficile de garder le cap. La boussole du sens de son action entrepreneuriale est indispensable pour prendre chaque jour les meilleures décisions.

Identifier son moteur

Si le sens est un sujet interne, le moteur est en revanche un apport externe. C’est le déclencheur, ce qui fait que nous nous mettons en action. Quels contexte, situation, environnement nous donne envie d’agir ou de nous lever le matin pour soulever des montagnes ? Sans connaitre notre moteur nous risquons de nous orienter vers le mauvais endroit. De passer à côté des conditions optimales pour agir. Déployer son talent et son énergie dans un contexte inadéquate est une perte de temps.

Clarifier ses envies d’action

Le sens et le moteur sont des notions qui peuvent paraître abstraites. Dans le quotidien du dirigeant-entrepreneur, cela se traduit par des types de tâches, d’actions ou d’échanges. Cela revient à préciser de façon très concrète : sur quoi avons-nous envie de travailler, avec qui, et comment ?

Une fois ces 3 points posés, les fondamentaux sont acquis. La sérénité apparaît à l’horizon ainsi que les objectifs opérationnels qui en découleront, stratégiques, économiques, commerciaux, financiers, etc… Ils me semblent tous pertinents dès lors qu’ils permettent de mesurer l’activité réelle de l’entreprise et qu’ils sont alignés avec ces trois prérequis : sens, moteurs et actions.

Identifier ses moyens réels avec sincérité

Il est courant de poser ses objectifs et de se mettre en action immédiatement. Comme nous savons où nous allons, nous nous mettons en mouvement. En réalité, poser des objectifs sans identifier clairement ses moyens, c’est faire 50% du travail. Un objectif sans moyen est un vœu pieux ou une envie mais pas un plan d’action permettant de travailler sereinement.

Quelles sont mes capacités et disponibilités de dirigeant-entrepreneur ?
Est-ce que je suis plus entrepreneur que dirigeant, ou l’inverse ? Qu’est-ce que j’apporte à l’entreprise ? Quels sont les talents et excellences que je peux proposer. A l’inverse sur quels points dois-je m’entourer du meilleur des autres ?

Dans ce métier, comme dans beaucoup d’autres, le temps est de loin la ressource la plus importante. Quel est le temps que je vais réellement - et sereinement - consacrer à mon métier ? Je suis ravie d’observer autour de moi un net recul de la mythologie du chef d’entreprise « Surhomme ». Nous sommes faillibles et avons besoin d’autre chose pour être performants et pleinement dans notre rôle.

Quelles sont mes compétences individuelles ? Quelles sont les compétences collectives de l’équipe ?
Ce sont les Hommes qui font l’entreprise. Il faut prendre en considération les individus, leur savoir-faire et leur savoir-être bien sûr.

Il faut aussi considérer la façon dont les individus fonctionnent collectivement. L’Alchimie d’une entreprise et d’une équipe, est le fruit de multiples facteurs parfois difficiles à identifier et/ou à nommer. Repérer et « étiqueter » les compétences individuelles techniques est assez simple.

Avoir une vue sur le savoir-être est un peu moins aisé. Comprendre les mécaniques humaines à l’œuvre qui permettent de délivrer un service ou un produit dans les conditions optimales pour les collaborateurs et les clients est un autre sujet.

C’est pourtant le cœur des moyens de l’entreprise pour atteindre ses objectifs.

Les moyens activables

Le 1er moyen c’est le dirigeant-entrepreneur et sa capacité à s’entourer des bonnes personnes dans les bonnes conditions. A la suite, il y a tout le reste où nous trouvons tout ce qui peut être mis sous les termes « moyens techniques et économiques ». Il en existe des milliers et mon propos n’est pas d’en faire une liste à la Prévert. En la matière je pense que le principal intérêt est de garder une adéquation réelle entre ses capacités et ses encours. Cela peut sembler évident mais c’est toujours bon à rappeler. En effet, L’enthousiasme entrepreneurial peut parfois prendre le dessus sur le bon sens.

Nous entreprenons souvent pour avoir la maîtrise de notre destin. Cette maîtrise commence par la capacité à préserver notre sérénité. Le stress pollue notre capacité de réflexion et d’action. Chacun a sa façon d’identifier ses objectifs et ses moyens, mais il me semble primordial de prendre le temps de le faire régulièrement et de les formaliser.